Pour une réponse féministe à la pandémie du COVID-19 Pour une réponse féministe à la pandémie du COVID-19
Pour une réponse féministe à la pandémie du COVID-19 Pour une réponse féministe à la pandémie du COVID-19

Pour une réponse féministe à la pandémie du COVID-19 Pour une réponse féministe à la pandémie du COVID-19

Que nous dit la crise COVID-19 de nos systèmes de santé et, plus globalement, de nos sociétés ? La crise du COVID-19 met brutalement en lumière les insuffisances des systèmes de santé du monde entier ainsi que les inégalités qui structurent nos sociétés. Plus concrètement, elle souligne deux choses : nos systèmes de santé sont … Continued

Que nous dit la crise COVID-19 de nos systèmes de santé et, plus globalement, de nos sociétés ?

La crise du COVID-19 met brutalement en lumière les insuffisances des systèmes de santé du monde entier ainsi que les inégalités qui structurent nos sociétés. Plus concrètement, elle souligne deux choses : nos systèmes de santé sont profondément inégalitaires et ils sont le miroir de nos sociétés patriarcales.

Ainsi, il n’est pas surprenant que les femmes soient actuellement en première ligne pour affronter la crise COVID-19 partout dans le monde. Les femmes sont surreprésentées dans le secteur des soins de santé, formel et informel. Et malgré l’importance cruciale de ce secteur, ses missions sont mal considérées, faiblement rémunérées – quand elles sont rémunérées – et rendues invisibles. De la même manière, il n’est pas surprenant que les femmes, qui représentent 70 % du personnel de santé mondial, n’occupent que 25 % des postes de direction dans le secteur de la santé. Plus que jamais, nous avons besoin d’une réponse féministe, pour gérer la crise du COVID-19 à court terme, mais aussi à plus long terme, pour repenser nos politiques publiques et notre gouvernance sanitaires, ainsi que nos sociétés dans leur ensemble.

À quoi ressemblera une réponse féministe à la crise du COVID-19 ?

En temps de crise, le risque d’un retour à de vieux schémas fondés sur des approches conservatrices et coercitives est réel. Partout dans le monde, nous constatons une recrudescence de la stigmatisation et des discriminations envers les populations considérées comme « vectrices » du virus – les jeunes, les personnes migrantes, les personnes en situation de prostitution. Des droits fondamentaux qui ont été durement acquis tels que les droits sexuels et reproductifs sont à nouveau attaqués. En Afrique de l’Ouest, nos partenaires observent la résurgence d’un discours pro-abstinence sexuelle, qui utilise comme prétexte les mesures de confinement, et porte un coup aux avancées politiques obtenues en matière de droits et santé sexuels et reproductifs.

Pourtant, une autre approche est possible dans ces contextes de crises. Elle se fonde sur les droits humains, les principes féministes et une approche globale des droits et de la santé sexuels et reproductifs. Cette démarche implique cinq grands principes d’action.

  • Il s’agit d’abord de promouvoir la santé en tant que droit humain et de considérer ce droit comme le moteur de toute décision politique, avant toute considération mercantile.
  • Deuxièmement, intégrer la dimension du genre lors de l’élaboration des politiques, ce qui implique d’analyser les conséquences des mesures, par exemple liées au confinement, sur les femmes et les filles de sorte à ce que celles-ci n’aggravent pas les inégalités liées au genre. Selon les besoins, cela passe par des mesures d’urgence telles que l’ouverture de lignes d’assistance téléphonique additionnelles ou la mise à disposition de places d’hébergements supplémentaires pour les victimes de violences conjugales.
  • Troisièmement, assurer la continuité des soins et préserver les droits en matière de santé sexuelle et reproductive.
  • Quatrièmement, veiller à ce que les approches positives envers la sexualité des femmes et des jeunes l’emportent toujours sur la stigmatisation et les réflexes conservateurs, en dispensant une éducation complète à la sexualité.
  • Enfin, il faut augmenter les financements alloués aux mouvements féministes et assurer leur participation dans l’élaboration des réponses à la pandémie du COVID-19, du niveau communautaire au niveau international.

Quelle est la prochaine étape ?

Les inégalités liées au genre en Afrique de l’Ouest et en France répondent aux mêmes dynamiques. Néanmoins, nous pouvons présumer que la pandémie frappera beaucoup plus durement l’Afrique de l’Ouest. Elle déstabilisera des systèmes de santé déjà fragiles ainsi que des batailles de longue date en faveur des droits et de la santé sexuels et reproductifs. La réponse féministe à la crise du COVID-19 sera à chercher dans l’expertise des organisations locales, qui auront toutes besoin d’un soutien politique et financier.

L’année dernière, les États du G7 se sont engagés à lutter contre les inégalités femmes-hommes et les inégalités d’accès aux soins de santé primaires, en mettant l’accent sur la région du Sahel. Et pourtant, les premières mesures mises en œuvre pour répondre à la pandémie du COVID-19 ne sont pas à la hauteur des enjeux. En France, le ministre des Affaires étrangères vient d’annoncer un « plan Covid » doté de 150 millions d’euros de dons et d’1 milliard d’euros de prêts pour faire face aux défis « à court terme ». Cette annonce est un double manquement, du fait de la prédominance des prêts par rapport aux dons pour financer la réponse, mais aussi de l’absence des mots “genre” et “femmes”.

Le gouvernement français a placé les approches féministes et basées sur les droits humains au cœur de sa politique étrangère. Des efforts ont été fournis pour adapter les politiques nationales d’égalité femmes-hommes dans le contexte difficile de la pandémie du COVID-19. Il est maintenant temps pour la France de mettre en œuvre une politique féministe globale cohérente. Equipop et ses partenaires en Afrique de l’Ouest francophone sont prêt·e·s à y contribuer.