La réalisation de la SDSR est indispensable à  l’égalité de genre : Entretien avec Dr Natalia Kanem et Dr Alvaro Bermejo
La réalisation de la SDSR est indispensable à  l’égalité de genre : Entretien avec Dr Natalia Kanem et Dr Alvaro Bermejo

La réalisation de la SDSR est indispensable à l’égalité de genre : Entretien avec Dr Natalia Kanem et Dr Alvaro Bermejo

La recherche indique que l’investissement en santé sexuelle et reproductive – incluant l’accès aux services de contraception moderne et d’avortement sans risque – est rentable et essentiel à la stimulation de la croissance économique et à la promotion de la santé, des droits et du bien-être des filles et des femmes, ainsi que de leur famille et de leur communauté.

La santé et les droits sexuels et reproductifs sont fondamentaux pour l’égalité de genre. Quand une femme peut contrôler son corps et sa fécondité, les progrès obtenus profitent à tout le monde.

La recherche indique que l’investissement en santé sexuelle et reproductive – incluant l’accès aux services de contraception moderne et d’avortement sans risque – est rentable et essentiel à la stimulation de la croissance économique et à la promotion de la santé, des droits et du bien-être des filles et des femmes, ainsi que de leur famille et de leur communauté.

Puisque la campagne Deliver for Good examine les avantages à investir en faveur de la santé et des droits sexuels, les personnes idéales pour nous faire part de leur expertise dans ce domaine sont les invité·e·s de notre entretien mensuel : Dr Natalia Kanem, directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) et Dr Alvaro Bermejo, directeur-général de l’International Planned Parenthood Federation (IPPF). La présidente et PDG de Women Deliver Katja Iversen a eu l’occasion de s’entretenir avec ces leaders récemment nommé·e·s à leur fonction respective, sur les mesures audacieuses nécessaires pour parvenir au respect, à la protection et à la réalisation de la santé et des droits sexuels et reproductifs des filles et des femmes partout dans le monde.

Katja Iversen : Vous avez récemment pris les rênes d’une des organisations les plus respectées qui visent à transformer le monde pour les filles et les femmes. Qu’est-ce qui vous a attiré dans cette nouvelle fonction, cette mission, et quelles sont vos priorités pour cette première année ?

Dr Alvaro Bermejo : À l’IPPF, nous nous battons pour que tout le monde puisse exercer son droit à faire ses propres choix en matière de santé reproductive et de droits sexuels. Mais trop de femmes sont emprisonnées pour des décennies suite à une fausse couche ou à un avortement. Ceci ne peut plus continuer. Des lois progressistes et un meilleur accès sont nécessaires à la réduction du nombre de femmes à qui une grossesse est imposée ou qui doivent recourir à des méthodes d’avortement non médicalisées. C’est là une des priorités pour l’IPPF, surtout lorsque l’on constate les reculs en matière de droits des femmes, comme cela a été le cas avec la règle du bâillon mondial.

N’oublions pas que la génération actuelle de jeunes est la plus importante de notre histoire mondiale. Nous devons agir rapidement pour supprimer les obstacles qui entravent la santé, le bien-être et le développement des jeunes. Ce n’est que lorsque les jeunes sont en bonne santé et autonomisé·e·s qu’ils et elles sont en mesure de contribuer à bâtir des communautés solides et des nations dynamiques.

Je rejoins l’IPPF à un moment où les possibilités sont énormes, mais également à une époque où nous devons défendre des avantages chèrement acquis. Le monde change, rapidement. Ceci signifie que nous devons accélérer le rythme des changements afin que les femmes et les filles soient capables de décider pour elles-mêmes, librement, de leur vie, où qu’elles soient.

Mes priorités sont l’amélioration de la qualité de nos services sur le terrain, l’élargissement de nos partenariats et de notre influence, pour veiller à ce que les engagements mondiaux entraînent des changements au niveau national, et le soutien des mouvements locaux de jeunes et de femmes.

Dr Natalia Kanem : Mon programme d’action est le programme universel que défend le FNUAP, à savoir la santé et les droits sexuels et reproductifs pour toutes les femmes et les jeunes sur la planète.

Mes priorités sont les suivantes : Je veux que le FNUAP et ses partenaires parviennent à obtenir trois résultats à la fois audacieux et transformateurs d’ici à 2030 : éliminer tous les décès maternels évitables, répondre au besoin non satisfait de planification familiale et mettre un terme aux violences basées sur le genre et aux pratiques néfastes à l’encontre des femmes et des filles. Et une base de données qualitatives sur la population nous aidera à veiller à ce que tout le monde soit pris en compte et que personne ne soit laissé-pour-compte.

Ce sont-là des objectifs ambitieux. Nous ne pourrons pas les atteindre seul·e·s. Le FNUAP mobilise donc des partenaires et des ressources supplémentaires. Nous collectons les données probantes nécessaires à cibler et atteindre celles et ceux que nous ne touchons pas encore, et particulièrement les adolescentes qui sont souvent les plus vulnérables et les plus fortement laissées-pour-compte. Nous renforçons pour cela nos initiatives de communication et de plaidoyer, et favorisons une culture de l’innovation sur les plans de la réflexion, du leadership et de l’action afin de maximaliser notre impact et la portée de notre travail.

Je suis active dans le domaine de la santé et des droits des femmes depuis aussi longtemps que je me souvienne. Étudiante, j’avais commencé à m’intéresser à la question de l’accès différencié des personnes aux médicaments et aux soins de santé. Ces réflexions m’ont accompagnée tout du long de ma carrière en tant que docteure en santé publique. En tant qu’étudiante de premier cycle à Harvard, en 1975, j’ai entendu parler de la première Conférence mondiale sur les femmes. Je suis montée dans un bus, puis un train, jusqu’à la ville de Mexico pour voir ce que les femmes du monde exprimaient à l’époque et en faire partie. C’est une mission qui m’a accaparée, et a fortement influencé la trajectoire de ma vie. Plusieurs années plus tard, j’ai participé à la Conférence internationale sur la population et le développement (CIPD) au Caire, en 1994, puis à la Conférence mondiale sur les femmes à Beijing en 1995.

« Il est absolument essentiel que les pays prennent des mesures pour défendre les droits en santé et la dignité des femmes et des filles. » – Dr Natalia Kanem, directrice exécutive du FNUAP

Quand j’y repense, aujourd’hui, je réalise que c’est un honneur et un immense privilège pour moi que de diriger l’une des agences des Nations Unies qui est à la tête de la définition des standards et des interventions sur ces questions au niveau mondial. Et j’ai toujours la même détermination à servir les femmes et les filles les plus pauvres et les plus vulnérables dans le monde. Je n’aurais évidemment jamais imaginé en participant à la CIPD, que l’on me demanderait, quelque 25 années plus tard, de diriger le FNUAP, l’organisation garante du programme novateur de la CIPD qui considère que les droits, les capacités et la dignité des personnes sont les fondements même du développement international.

Nous célèbrerons deux anniversaires l’année prochaine : les 25 ans de la CIPD et les 50 ans du FNUAP ! C’est dont une incroyable occasion de mobiliser le monde entier à s’engager à nouveau en faveur de la vision exprimée au Caire, de fêter nos réussites et de nous concentrer pour atteindre celles et ceux qui sont encore laissé·e·s-pour-compte.

Katja Iversen : Bien que nous constations des progrès, nous remarquons également que des vents politiques conservateurs soufflent partout dans le monde : quelles nouvelles dynamiques politiques compliquent davantage votre travail aujourd’hui qu’elles n’auraient pu le faire il y a 20 ans ? Et de quelles manières, en particulier, allez-vous relever ces défis ?

Dr Alvaro Bermejo : Il y a toujours eu une opposition de la part des personnes qui veulent contrôler et contraindre les femmes. Mais contrairement à ce qui était le cas il y a 20 ans, l’opposition est aujourd’hui très bien financée et coordonnée, et dispose du soutien politique des leaders populistes, ce qui a déjà un impact dramatique aux niveaux national et international. La santé et les droits sexuels et reproductifs sont attaqués tous les jours.

Je suis convaincu que nous pouvons lutter contre ces forces régressives en démontrant l’impact humain de notre travail. Les soins de santé sexuelle et reproductive ne font pas de discrimination. Tout le monde a besoin de ces services, et cela implique un accès pour tout le monde. Pour y parvenir, il est essentiel que nous soyons uni·e·s en tant que communauté de SDSR. La solidarité est l’approche à adopter. Nous devons tirer profit de la dynamique et nous mobiliser pour renforcer les soutiens à la fois politiques et financiers, en ouvrant nos portes à d’autres causes et d’autres mouvements. Nous devons être uni·e·s et fort·e·s.

Dr Natalia Kanem : Je dirais que toute opposition que nous pouvons voir aujourd’hui semble plus importante qu’elle ne l’est car elle nous apparaît sur fond des immenses progrès réalisés par la communauté internationale ces 20 dernières années.

Ceci dit, il est vrai que nous voyons un certain recul, et particulièrement au niveau des questions clé que sont les droits sexuels et reproductifs, l’avortement, l’éducation complète à la santé, la place des parents, de la culture et de la religion, et l’orientation sexuelle et l’identité de genre. Il est plus important que jamais de démystifier ces idées fausses à l’aide de faits et de données probantes, et nous comptons sur les partenaires partageant ces mêmes idées – dont Women Deliver ! – pour continuer à nous aider à mettre ces informations en avant.

Si l’on regarde le verre à moitié plein, il faut dire que nous remarquons également une solidarité et une mobilisation immenses. Nous voyons des femmes et des jeunes manifester dans les rues, se faire entendre et réclamer leurs droits. Nous voyons davantage d’hommes et de garçons prendre position en faveur des droits des femmes. La communauté des droits et de la santé sexuels et reproductifs est unie et résiliente. Nous n’allons ni abandonner, ni capituler. La dynamique est de notre côté.

Depuis 1990, les décès maternels ont chuté de 44 pour cent et plus de femmes que jamais utilisent la contraception moderne de leur choix. Notre principal défi aujourd’hui est d’atteindre les femmes et les filles que nous ne touchons pas encore : les plus de 800 femmes et filles qui meurent encore chaque jour en accouchant, les plus de 200 millions de femmes qui n’ont pas accès à la planification familiale moderne, et les dizaines de milliers de femmes qui sont forcées de se marier tous les jours. Il est grand temps de garantir les droits reproductifs de tout le monde. De chaque personne. Où qu’elle soit.

Katja Iversen : On m’a souvent entendue dire que la capacité d’une femme à contrôler sa propre fécondité constitue la base de l’égalité de genre – et du progrès pour tout le monde. Quel lien faites-vous entre l’égalité de genre, le contrôle par les femmes de leur propre corps et la réalisation des objectifs de développement durable. Merci de donner des exemples.

Dr Alvaro Bermejo : Une femme qui contrôle son corps est une femme qui contrôle sa vie et bâtit son avenir. Cela commence par la fécondité, mais va bien plus loin. Une femme qui a le droit d’accéder à l’information et aux soins de santé est une femme qui peut faire un choix. Chaque femme devrait être en mesure de décider et de disposer des compétences et de la confiance nécessaires pour dire « non » à ce qu’elle pense ne pas lui convenir. Pour s’épanouir dans la vie, les femmes doivent avoir les mêmes possibilités que les hommes, et les filles les mêmes que les garçons.

Il est également important de rappeler que d’autres facteurs essentiels entrent en jeu pour atteindre l’égalité de genre et pour que les femmes puissent avoir le contrôle sur leur corps. Les ODD incluent la plupart de ces facettes, telles que l’éducation, de manière holistique. Nous devons donc nous assurer que les engagements politiques soient supervisés au niveau national et des progrès réalisés dans tous les domaines, afin que les améliorations positives indispensables aux vies des femmes et des filles soient obtenues sur le terrain : de la fréquentation de l’école à l’accès aux soins de santé, en passant par la capacité à travailler et à profiter d’une vie exempte de souffrance et de peur.

Dr Natalia Kanem : L’égalité de genre est un droit humain. Le droit d’une femme de prendre les décisions concernant son propre corps est au centre de ce droit. Lorsqu’une femme est en mesure de planifier sa famille, elle peut planifier le reste de sa vie. La protection et la promotion de ses droits reproductifs, et notamment droit de décider du nombre d’enfants qu’elle aura et d’espacer les naissances, sont indispensables à l’assurance de sa liberté à participer plus entièrement et équitablement dans la société et dans l’économie.

Dans les pays où les populations sont les plus jeunes, l’instauration de l’égalité entre les filles et les garçons peut contribuer à éradiquer la pauvreté – ce qui correspond à l’ODD 1. Et lorsqu’une adolescente peut éviter d’être mariée en tant qu’enfant ou une grossesse non planifiée et rester à l’école, lorsqu’elle détient les compétences nécessaires pour trouver un travail décent et participer pleinement à tous les aspects de la vie, elle devient un meilleur atout pour l’économie de son pays.

« Élargir les possibilités et les choix pour les femmes et les filles les plus pauvres est ce que nous faisons de plus important. » – Dr Natalia Kanem, directrice exécutive du FNUAP

Au FNUAP, notre recherche a révélé qu’un investissement annuel d’un peu moins de quatre dollars par personne dans nos programmes de réduction du mariage des enfants permettra d’obtenir des avantages économiques de près de six fois l’investissement total d’ici à 2030. Plus le pays est pauvre, plus l’impact est important.

Un rapport McKinsey de 2015 indique que si les femmes participaient comme les hommes à l’économie, le PIB mondial augmenterait de 28 billions de dollars d’ici à 2025, soit une augmentation de 26 pour cent.

Dit simplement, permettre aux filles de grandir en s’éduquant et s’autonomisant est l’une des manières les plus efficaces de sortir un pays de la pauvreté.

Katja Iversen : Dans le climat politique actuel, pourquoi est-il important de ne pas s’écarter de la gamme complète de services de SDSR, dont l’accès à l’avortement sans risque. Et comment parviendrez-vous à ne pas fléchir et vous assurer que toutes ces questions demeurent à l’ordre du jour ?

Dr Alvaro Bermejo : Nous avons de grandes ambitions en tant que communauté internationale, mais il nous faut reconnaître que nous sommes loin de nos objectifs et que le besoin est encore énorme. Cela a un impact au quotidien sur les femmes. L’accès à l’avortement sans risque est une base fondamentale des droits sexuels. Rogner ce droit fragilise le fondement de tous les droits sexuels. L’opposition à l’avortement sans risque est purement idéologique, au point où les femmes peuvent même être envoyées en prison pour une fausse couche dans cinq pays du monde. Sept millions de femmes dans les pays en développement devront se rendre à l’hôpital ou risquent de décéder ou d’être invalides des suites de complications d’un avortement non médicalisé.

L’accès à l’avortement légal et sans risque sauve des vies. Les données probantes robustes et incontestables existent. L’IPPF défend, et défendra toujours, l’accès à l’avortement sans risque en fournissant des services hautement qualitatifs et sans jugement à toutes les femmes.

Katja Iversen : Il y a actuellement 1,8 milliard de jeunes dans le monde, soit le nombre le plus important de l’histoire de l’humanité. Parlons de la santé sexuelle et reproductive des jeunes. Pourquoi est-ce une question qu’on ne peut ignorer ?

Dr Alvaro Bermejo : Les faits sont très clairs. Il y a, chez les jeunes, une plus grande incidence d’infections sexuellement transmises et de grossesses non planifiées, et cette situation est principalement due au manque d’accès à la contraception moderne et à un conseil de bonne qualité et impartial. Dans certains pays, les jeunes se voient refuser les services de SDSR à cause de leur âge, leur statut marital ou la stigmatisation.

Avec une éducation complète à la sexualité, les jeunes sont autonomisé·e·s par une information solide qui les aide à prendre des décisions relatives aux questions clé pour leur vie. Nous voulons bâtir un nouveau monde dynamique, dans lequel l’éducation sexuelle est abordée depuis l’angle du respect et du plaisir plutôt que de la violence, la peur ou l’abstinence.

Il est évident que l’accès à une bonne éducation et des connaissances robustes contribuent à la protection des jeunes. Cela leur donne la confiance indispensable pour dire « non » aux personnes qui voudraient les contraindre à faire des choses qu’ils et elles ne veulent pas faire mais auxquelles ils et elles ne sauraient s’opposer sans les compétences et les connaissances nécessaires. Nous ne croyons pas que refuser l’éducation et la protection aux jeunes soit admissible.

Dr Natalia Kanem : La génération des jeunes est incroyablement nombreuse aujourd’hui. La manière selon laquelle ces jeunes parviendront à passer de l’adolescence à l’âge adulte déterminera non seulement le cours de leur vie, mais également celui du monde tout entier.

La plupart des 1,8 milliard de jeunes auxquel·le·s vous faites allusion vivent dans des pays en développement, et représentent souvent une immense proportion de la population. Mais cette jeunesse est tout de même systématiquement empêchée de grandir dans la sécurité et l’autonomisation. Dans les pays en développement, une fille sur quatre est mariée avant ses 18 ans. Une sur neuf est mariée avant l’âge de 15 ans. Chaque jour, dans les pays en développement, 20 000 filles de moins de 18 ans accouchent. Et il est estimé que 200 millions de filles et de femmes aujourd’hui vivantes ont subi une forme ou une autre de mutilation génitale féminine.

Ces violations privent les filles de leurs droits, de leur dignité et de leurs possibilités de choisir leur avenir. Elles privent également les sociétés et les économies. En refusant à la moitié de la population les possibilités de réussir, un pays se refuse à lui-même l’occasion de se développer plus rapidement.

« Main dans la main avec les jeunes de la planète, il n’y a rien d’insurmontable. » – Dr Natalia Kanem, directrice exécutive du FNUAP

Garantir que les jeunes connaissent et puissent exercer leurs droits est au centre du mandat du FNUAP. Nous travaillons avec des gouvernements, la société civile et des organisations menées par des jeunes en vue d’élargir l’accès à l’information, au conseil et aux services en santé sexuelle et reproductive, dont la contraception volontaire, à l’ensemble des jeunes. Nous plaidons également en faveur de l’intégration de l’éducation complète à la sexualité dans les programmes scolaires. Cette information change les vies – et peut également en sauver – car elle donne aux jeunes les outils leur permettant de connaître leur corps, de mener une vie saine et de développer des relations saines. Le FNUAP soutient également des programmes de promotion de l’égalité de genre, et particulièrement ceux qui visent les adolescent·e·s vulnérables et qui soutiennent les jeunes mères.

Katja Iversen : Il y a eu, ces derniers temps, un nouvel essor et une ouverture du dialogue autour des abus sexuels, des dynamiques de pouvoir et de l’égalité de genre. En tant que leader dans ce domaine, je me dois de vous poser la question : qu’est-ce que le FNUAP fait à ce propos et, à votre avis, que devrait-il se passer après #MeToo et #TimesUp ?

Dr Natalia Kanem : Cela a été une année incroyable en matière de droits des femmes, et nous avons vu l’impact que des personnes motivées et mobilisées peuvent avoir lorsqu’elles réclament des progrès significatifs. J’accueille cela de tout mon cœur et je suis si heureuse de voir que les questions que nous défendons à l’ONU se sont répandues dans le monde. Je voudrais également souligner que l’une de nos Ambassadrices de bonne volonté, Ashley Judd, a été une des figures de proue de ce mouvement et comptait parmi les premières célébrités à parler publiquement du harcèlement moral qu’elle a subi en tant que star de Hollywood. Cela a permis de rompre le barrage du silence.

Les abus et le harcèlement sexuels sont présents dans tous les secteurs de la société, de l’économie et de la vie publique. Il est absolument indispensable que ces injustices soient identifiées et corrigées, et que les auteurs de ces actes soient tenus pour responsables. L’ONU elle-même doit faire partie de ce processus.

« Le mouvement #MeToo fait face au harcèlement et aux abus sexuels répandus de par le monde. Je vous dis : Persévérez ! N’abandonnez pas ! » – Dr Natalia Kanem, directrice exécutive du FNUAP

En tant qu’une des principales agences de l’ONU œuvrant à l’éradication des violences basées sur le genre, à l’autonomisation des femmes et à la protection de leurs droits, le FNUAP doit respecter les standards les plus élevés en la matière. Le FNUAP applique une tolérance zéro envers l’exploitation et les abus sexuels. Nous prenons cela très au sérieux. Je veux que toutes les personnes du FNUAP se sentent en mesure de rompre le silence et de prendre la parole. Nous avons également récemment renforcé et rendu obligatoire la formation à ce propos pour tous et toutes les membres de notre personnel. Nous prenons très au sérieux chacune des déclarations de harcèlement, d’exploitation ou d’abus sexuels. Chacune de ces déclarations fait l’objet d’une enquête et nous punissons les personnes qui se révèlent avoir pris part à ces fautes graves.

Le FNUAP a également une politique relative au harcèlement, au harcèlement sexuel, à l’abus de pouvoir et à la discrimination qui donne des indications à suivre aux membres du personnel qui pensent avoir subi du harcèlement sexuel.

Au niveau mondial, j’espère que #MeToo et #TimesUp peuvent continuer à traverser les frontières géographiques, culturelles, économiques et linguistiques afin que les femmes, les filles et les autres personnes qui sont confrontées à l’oppression puissent tirer profit de cette dynamique et créer des changements à la fois significatifs et durables.

Katja Iversen : Qu’est-ce qui vous a inspiré à travailler dans ce domaine, et qu’est-ce qui continue de vous motiver à vous engager en faveur de ces questions ?

Dr Alvaro Bermejo : La détermination des militant·e·s et des organisations qui veillent à ce que l’accès à la SDSR soit assuré pour tout le monde me stimule grandement. Cela se résume essentiellement à l’attention que nous portons aux autres êtres humains. J’ai travaillé de nombreuses années dans ces secteurs, mais c’est quand je rends visite à des pairs éducateurs et éducatrices, des associations membres et du personnel basé dans les communautés que je me sens vraiment revigoré par leur passion et leur engagement à améliorer la vie des gens. Je me suis engagé à faire avancer ce mouvement et à garantir que l’IPPF continue d’être une actrice de changement influente aux niveaux national, régional et mondial. Nous nous sommes engagé·e·s à répondre aux besoins de soins de santé de toutes les personnes, où qu’elles se trouvent et pour aussi longtemps qu’elles le veulent.